Les prémices remontent à 1998 où était créé à Doha le Qatari French Business Club pour mettre en contact, au cours de réunions mensuelles, les différents acteurs économiques de l’émirat, les chefs d’entreprise installés au Qatar ou envisageant d’y travailler. Il faudra encore attendre vingt années pour voir naître la CCI France Qatar, en 2018, un an après l’ouverture de la Maison de la France dans le centre financier de Doha. Quatre ans après sa création, la CCIFQ rassemble aujourd’hui la majorité des entreprises tricolores installées au Qatar, quelle que soit leur taille – grands groupes, ETI ou PME. Elles sont une soixantaine au total, des géants du CAC 40, comme TotalEnergies et Vinci Energies, aux grosses pointures de la finance, du juridique, de la sécurité et de la défense, en passant par la construction, les transports, l’événementiel et l’hôtellerie. L’organisme commence également à intégrer des holdings qatariennes qui souhaitent commercer avec les entreprises françaises. « Notre mission est de promouvoir les échanges entre le Qatar et la France, de constituer un réseau de relations et un lobby d’affaires et de promouvoir l’image de la France et la compréhension mutuelle franco-qatarienne », détaille dans un entretien au média en ligne Qatar Actu Sandrine Lescaroux, directrice générale de la CCIFQ, qui travaille pour cela main dans la main avec l’ambassade de France, son service économique, Business France, et les conseillers du Commerce extérieur.
Nombreux avantages fiscaux
Exporter ou s’implanter au Qatar, c’est relever le gant d’un pays qui entend se doter – quand il ne l’a pas déjà fait – de ce qu’il peut exister en toute chose de plus remarquable, en performance, en précision, en durabilité aussi, selon l’esprit du slogan de son autorité des Travaux publics, que le pays tout entier pourrait faire sien : « Qatar deserves the best » (le Qatar mérite le meilleur). Car si l’émirat investit beaucoup à l’international, il développe très largement son industrie locale et compte notamment sur le savoir-faire européen pour améliorer son urbanisation. « La France n’est certes pas le premier partenaire du pays, reconnaît Sandrine Lescaroux, mais nous sommes très présents en ce qui concerne les biens de consommation et le luxe, par exemple. » Pour les services, le secteur des hydrocarbures mais aussi les infrastructures, l’assainissement, la défense, l’éducation et l’hospitalité impliquent de grands acteurs français présents sur le long terme au Qatar. L’émirat offre aux investisseurs étrangers la possibilité d’être propriétaire à 100 % de leur entreprise ainsi que de nombreux avantages (main-d’œuvre flexible, congé fiscal de vingt ans et prix attractifs pour l’électricité, l’eau ou le gaz). Par ailleurs, la fiscalité y est très avantageuse notamment pour les entrepreneurs étrangers. Le capital investi est exonéré de revenus fiscaux pendant dix ans maximum à partir de la date de mise en œuvre du projet. Au Qatar, le taux minimum de la fiscalité est de 10 % et il n’est pas applicable aux entreprises cotées. Enfin, il n’existe pas de TVA pour le moment.
Réfléchir à sa structure
« Il faut passer du temps dans le pays pour l’étudier et le comprendre avant de s’y installer, assure dans un entretien à la CCIFQ Max-André Delannoy, PDG de QICC à Doha, une entreprise de fabrication de câbles électriques (joint-venture entre le Français Nexans et le Qatari Al Mirqab), commencer par vendre depuis une base existante. Ensuite, il est important de réfléchir à sa structure, en fonction de ce que l’entreprise sait faire, de ce qu’elle veut faire et de là où elle veut garder le contrôle : avec ou sans partenaire, et quel type de partenaire. Puis il faut se faire les dents, répondre à un premier appel d’offres, le perdre, en remporter un second après avoir compris quels risques prendre et gérer, l’exécuter et approfondir sa maîtrise du fonctionnement du business au Qatar. Enfin, suggère le Français, il faut bien regarder le marché, pas seulement le passé mais aussi ses perspectives d’évolution qui peuvent être très rapides ici. Il ne faut pas arriver trop tard avec un pic de consommation derrière nous et des concurrents bien établis. » Enfin, d’après un conseiller proche du gouvernement, mieux vaut ne pas se plaindre de la chaleur, de la circulation ou de son environnement géographique. Les Qatariens sont fiers de ce qu’ils ont fait de leur capitale, Doha, et ne comprennent pas toujours les critiques des Occidentaux. Le savoir est un avantage !
> Six conseils pour une implantation réussie au Qatar
Les erreurs sont fréquentes pour une entreprise souhaitant approcher l’émirat, le plus souvent par méconnaissance des us et coutumes qui peuvent froisser votre vis-à-vis. La culture, l’histoire et la langue ne sont pas les mêmes, tout comme la façon de commercer. Voici quelques conseils de la CCIFQ qui pourraient vous éviter quelques fautes… d’impression (la première étant souvent celle que gardera de vous votre interlocuteur).
1- Connaître l’environnement local, les traditions et la culture du business du pays. Encore une fois, la façon de faire du commerce ici au Proche-Orient est bien différente de ce que l’on connaît en Europe. Pour ne pas perdre de temps, il faut trouver d’emblée le bon interlocuteur.
2 – Ne pas se lancer au Qatar si on n’a pas la force financière pour le faire. « Le meilleur conseil que je puisse donner, c’est de bien choisir son sponsor, de trouver le bon partenaire qatarien, avance le Français Maxime Ardilouze, directeur de la société Skymakers, à Doha, spécialisée dans les murs et les plafonds tendus. Un bon partenaire est celui qui a un réseau important, ce qui peut aider à 50 % du démarrage. Il y a ici une réelle culture de la discussion. »
3 – Prévoir une présence locale régulière, la confiance d’un potentiel client/partenaire se gagnant dans la durée. Au Qatar, on ne vient pas pour faire un « coup » mais pour tenter de s’installer dans le paysage sur le long terme. Les Qatariens aiment que l’on vienne à eux et s’attendent généralement à parler avec le PDG et non les directions commerciales.
4 – Envisager de prendre l’avion du jour au lendemain si besoin. Un rendez-vous se sollicite un à deux mois à l’avance et il faut accepter qu’il soit modifié, décalé ou repoussé à la dernière minute. Les Qatariens aiment à dire que « le temps est le meilleur allié du temps ».
5 – Prévoir une documentation en anglais, voire en arabe. Attention aux cartes de visite exclusivement européennes… La documentation doit être précise et impeccable. Les contacts mentionnés doivent être facilement joignables et capables de répondre aux innombrables questions que se posent généralement les investisseurs.
6 – Prendre conseil auprès d’un avocat conseillé par la CCI France Qatar avant la signature de tout document commercial. Les termes et le modèle d’un contrat commercial sont très différents de ce que l’on trouve en Europe. Attention aux mots ou expressions faux-amis dont on croit, à tort, avoir saisi tout le sens parce qu’on l’a lu ou écrit dans d’autres contrats.